Dans ces grands principes, la fabrication de la bière n'a pas varié depuis le Moyen-Âge, voire les Sumériens. Il s'agit toujours de transformer des céréales en une boisson désaltérante, savoureuse et plus ou moins alcoolisée, grâce aux mystères de la fermentation.
Toutes les différences de goût, de saveur et de couleur proviennent des techniques et des coutumes propre à chaque pays, à chaque style, à chaque maître brasseur.
Le brassage de la bière est uniquement une question de savoir-faire, qu'il soit héritage des plus anciennes traditions ou expression des techniques les plus évoluées.
La fabrication de la bière
La préparation des matières premières
Avant le brassage, certaines opérations doivent transformer ou préparer les matières premières.
La transformation de l'orge en malt (le maltage) est faite en malterie. Autrefois, la malterie était un simple “atelier” de la brasserie. Aujourd'hui, c'est une industrie à part entière et ces “ateliers” ont fait place à des malteries indépendantes.
Le cycle de fabrication du malt s'étale sur une dizaine de jours et comporte quatre étapes : le nettoyage, le trempage, la germination, le touraillage.
Après avoir sélectionné les grains d'orge, ceux-ci sont débarrassés de la poussière, de la terre, des cailloux, des graines étrangères, des grains cassés à l'aide de souffleries et de tamis.
Au terme des différentes opérations de nettoyage, on procéde au trempage des grains qui consiste surtout de procurer à ceux-ci l'humidité et l'oxygène nécessaires pour que l'orge se développe, ce qui améne un début de germination.
A l'issue du trempage, vient la germination qui prépare le grain pour le brassage. La germination est une transformation délicate qui voit le grain respirer et s'échauffer : il est nécessaire de l'aérer, de l'humidifier, tout en surveillant la température pour avoir une germination régulière, et de le retourner souvent pour éviter son étouffement par l'acide carbonique.
Lors de la germination, des réactions chimiques ont lieu, en particulier la transformation des protéines en enzymes. Lorsque la transformation est suffisante, il reste au malteur à arrêter la germination et à sécher le grain qui contient jusqu'à 45% d'eau, c'est le touraillage.
A l'issue de cette transformation, l'orge est devenue ce que l'on appelle du “malt vert”.
La germination de l'orge
Le touraillage s'effectue dans des fours en forme de tour surmontés de cheminées d'aération (tourailles). Le “malt vert” est placé sur des plateaux perforés au travers desquels circule un courant d'air chaud. Le touraillage apporte au malt une couleur plus ou moins prononcée, ce qui donnera des bières plus ou moins colorées, et un goût particulier.
Ainsi, pour un malt pâle ou blond, servant à la fabrication de la bière blonde, le touraillage s'effectue à une température de 70°C. Pour un malt brun, destiné à des bières plus brunes, la température est de 90°C. Des malts plus bruns sont touraillés aux environs de 120-140°C. Les malts sombres, appelés malts torréfiés, voient leur température de touraillage monter à 225°C : ils sont utilisés principalement dans les bières brunes irlandaises, et ont un arôme amer intense. Le malt est régulièremnt retourné, puis à l'issue du touraillage, il est stocké un minimum de trois semaines.
Le Brassage
Le brassage proprement dit de la bière est en fait une suite d'opérations fort différentes : concassage du grain, empâtage, brassage et filtration, cuisson et houblonnage, refroidissement.
Le concassage du malt consiste à réduire le grain en farine qui va se dissoudre dans l'eau du brassage. Avec le brassage, le maître-brasseur va chercher à extraire la farine du grain, grâce à l'eau, à une élévation progressive de la température et au brassage proprement dit, c'est-à-dire au mouvement imprimé à la maische, formée du malt et des grains crus. Les enzymes du grain transforment l'amidon en sucre qui deviendra, au cours de la fermentation, alcool et gaz carbonique.
Cuves de brassage
L'empâtage consiste à humidifier le malt concassé avec de l'eau, pour faciliter le début du brassage. Selon le matériel utilisé et le type de bière souhaitée, deux grandes méthodes de brassage existent : le brassage par infusion (utilisé surtout pour les bières de fermentation haute de type Ale) et le brassage par décoction ( pour les bières de fermentation basse).
L'infusion se pratique en chauffant progressivement le brassin (mélange les grains avec l'eau). On éléve généralement la température à 45°C, température maintenue pendant une demi-heure environ, pour obtenir une dissolution des matières azotées. Puis on augmente la température à 62°C, pendant une demi-heure encore, pour la formation de sucres fermentescibles, puis à 70°C, pour la formation de dextrines. Le brassage par infusion se termine à 75°C.
Le brassage par décoction est plus long et plus difficile. Il consiste à prélever une partie du brassin que l'on chauffe à part à 70°C avant de le faire bouillir. Puis on remet ce brassin bouillant avec le brassin non prélevé, ce qui a pour effet de faire monter la température à environ 55°C. L'opération est renouvelée deux autres fois, permettant d'obtenir une température de 75°C.
Suite à ces opérations, aussi bien par infusion que par décoction, le brassin contient deux matières qu'il faut séparer : le moût, liquide sucré qui deviendra la bière, et les drêches. Dans la cuve de brassage, les drêches se déposent au fond de la cuve. La cuve est ensuite vidée par le bas, si bien que le moût traverse les drêches : refiltré tant qu'il est trouble, il devient rapidement clair. Le moût est ensuite pompé dans la chaudière à cuire oû l'ébullition va le stabiliser et le stériliser. Enfin il va recevoir le houblon qui lui donnera son amertume et son parfum.
Le soutirage du moût
La quantité de houblon dépend du type de houblon utilisé et du type de bière souhaité. Les cônes sont mis en plusieurs fois dans le moût bouillant qui cuît dans la chaudière à cuire. Puis ils sont récupérés, au moment de la vidange de la chaudière, dans un bac qui joue le rôle de filtre. Le moût clarifié est refroidi à l'abri de l'air, dans un bac refroidissoir, oû il est en contact, au travers de minces plaques d'acier inoxydable, avec de l'eau très froide. Il passe ainsi, en quelques instants, de sa température d'ébullition à la température idéale de fermentation: aux environs de 8°C.
La Fermentation
La Fermentation est sans aucun doute la phase la plus délicate de la fabrication de la bière.
Quelle que soit la température à laquelle doit se produire la fermentation, haute ou basse, qui détermine les deux grandes catégories de bières dans le monde, on distingue deux phases de fermentation: la principale, dite “tumultueuse”, et la secondaire, dite “de garde”.
La fermentation principale transforme les sucres fermentescibles du moût en alcool et en gaz carbonique. Le processus est déclenché par le mélange d'un peu de moût et de levure. Au bout de 24 heures, une mousse importante se forme et se maintiendra au-dessus du moût pendant toute la durée de la fermentation, soit 7 à 8 jours.
Les cuves de fermentation où réside le mystère de la bière
C'est au cours de cette période que se forment le goût, l'arôme et le gaz carbonique. La fermentation principale se ralentit lorsque le moût s'est appauvri en matières sucrées et azotées. Intervient alors la fermentation secondaire, dite de garde. Cette seconde fermentation peut durer de quelques jours à plusieurs mois, selon la qualité et le type de bière. La bière continue à fermenter; elle se décante, son goût s'affine et enfin elle se sature en gaz carbonique. La garde s'effectue dans des cuves constituées de tanks métalliques ou bien de foudres en bois ou en ciment.
La Filtration
Bien que l'action de la garde soit bénéfique pour la bière, celle-ci est loin de posséder toutes les qualités recherchées par le consommateur : elle est encore légèrement trouble et contient toujours des cellules de levure en suspension. La bière subit une filtration afin d'améliorer sa limpidité et sa stabilité.
Le Conditionnement
Avant la commercialisation, restent encore le soutirage et le conditionnement. Durant cette opération qui a pour but de faire passer la bière, stockée sous pression à 0°C dans une grande cuve, dans des tonneaux, des bouteilles ou des boîtes, la bière filtrée est très fragile et risque de s'oxyder, de s'infecter au contact de l'air ou encore de perdre une partie de son gaz carbonique.
C'est pour ces raisons, que les opérations de soutirage doivent s'effectuer dans des conditions d'hygiéne maximale. Pour remplir les différents modes de conditionnement, on utilise une soutireuse dite “isobaromètrique” qui permet de remplir les bouteilles, tonneaux ou boîtes sous pression et d'empêcher la bière de mousser. Puis entrent en action et à tour de rôle, la capsuleuse, la pasteurisation qui permet d'assurer la bonne conservation de la bière après sa sortie de la brasserie, et qui consiste à détruire toute trace de levure et micro-organismes en chauffant la bière pendant environ une vingtaine de minutes à 0°C, l'étiqueteuse.
Conditionnée définitivement sous pression dans des tonneaux ou des bouteilles bardées de leur étiquette rutilante, la bière entre dès lors dans le circuit de la vente.